Drouot Patrick Bruel

Dans les paniers d'osier de la salle des ventes
Une gloire déchue des folles années trente
Avait mis aux enchères, parmi quelques brocantes
Un vieux bijou donné par quel amour d'antan

Elle était là, figée, superbe et déchirante
Les mains qui se nouaient, se dénouaient tremblantes
Des mains belles encore, déformées, lеs doigts nus
Comme sont nus, parfois, les arbres еn novembre

Comme chaque matin, dans la salle des ventes
Bourdonnait une foule, fiévreuse et impatiente
Ceux qui, pour quelques sous, rachètent pour les vendre
Les trésors fabuleux d'un passé qui n'est plus

Dans ce vieux lit cassé, en bois de palissandre
Que d'ombres enlacées, ont rêvé à s'attendre
Les choses ont leurs secrets, les choses ont leurs légendes
Mais les choses murmurent si nous savons entendre

Le marteau se leva, dans la salle des ventes
Une fois, puis deux fois, alors, dans le silence
Elle cria : "Je prends, je rachète tout ça
Ce que vous vendez là, c'est mon passé à moi"

C'était trop tard, déjà, dans la salle des ventes
Le marteau retomba sur sa voix suppliante
Tout se passe si vite à la salle des ventes
Tout se passa si vite, qu'on ne l'entendit pas